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IEMZA 
né en 1978, vit et travaille à Reims.

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Iemza fait partie de ces artistes auto-didactes à la volonté tenace, qui l’a mené, d’une pratique impérative, obstinée, sur des murs de terrains vagues aux galeries parisiennes. Et puis il y a cette évidente cohérence du trait, cette force graphique, ce tracé noir et incisif qui marquent d’emblée son monde aussi foisonnant que sa production elle-même. D’un dessin à l’autre, il a étoffé une ténébreuse mythologie rétro-futuriste riche de correspondances.

On pourrait le qualifier bêtement de street-artist mais on risquerait de passer à coté de toute la profondeur de son travail dont les références se situent davantage dans la pop culture que dans le graffiti. Le constat est clair, son travail est inclassable. Iemza sème la confusion et c’est ce qui rend sa pratique si singulière, sa production si personnelle. 

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L’histoire est assez banale, Iemza grandit dans le quartier du Mont Bernon, une zone urbaine sensible d’Epernay. Le rap, le hip hop et le graffiti sont constitutifs de la culture dominante de cette époque dans ces quartiers. Il va s’en imprégner et associer ses codes d’adolescent à ceux de la culture familiale. Son père dessine, il chine de vieux objets, des BD et nourrit une vraie passion pour le cinéma des années 50. Après une phase d’expérimentation et d’affirmation graphique sur des murs abandonnés, les legs de jeunesse qui ont décantés, mixés à sa pratique, ouvrent la voix à une démarche plus mature, plus personnelle, affranchie des codes graphiques éculés du street art. Son travail prend une dimension et une puissance toute nouvelle.

Quand il parle de son travail, Iemza évoque son rapport fasciné au volume, à la perspective et à l’architecture. Un jour Il tombe par hasard sur Plateforme pétrolière (1980) de Pierre Parrat dont le dessin fait un troublant écho graphique à son travail. Il s’apercevra plus tard qu’il est l’architecte à l’origine du quartier de son enfance.

Iemza a un référentiel esthétique nourri de séries B, du foisonnant cinéma de science-fiction (Total Recal, Blade Runner) ou d’auteur (Play Time de Tati ou Alphaville de Godard), mais aussi de mangas prophétiques (Akira, Ghost in the shell). Il s’inspire de la littérature paranoïaque de Philip K.Dick. Il fait référence aux grands ensembles architecturaux bétonnés des banlieues à la rigueur minimaliste autant qu’à la construction avant-gardiste d’Abraxas de Noisy-le-Grand conçue par l’architecte Ricardo Bofill, par exemple.

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Il y a chez Iemza, une certaine fascination pour la vie dans la ville. Celle qui nous domine, nous façonne, nous enferme parfois. Ambivalente, elle ne souhaite pas trancher entre la prison étouffante et le terrain de jeu sans limite. Cette vision organique de l’urbanisation est le prisme par lequel il aborde nos anxiétés contemporaines.

Ses dessins sont autant de fenêtres ouvertes sur un monde en mutation, ils sont pétris de questionnements existentiels. On devine un récit visionnaire qui porte un regard sombre, presque dystopique. Ces villes qui deviennent des forteresses ne sont pas sans rappeler les Carceri (1745) de Giovanni Battista Piranesi, prisons dont la dominante architecturale et ce trait noir profond affichent une troublante correspondance avec le travail de Iemza.
La présence récurrente d’insectes font écho aux bestioles en tous genres qui rampent au marge des tableaux de Jérôme Bosch, comme la marque d’un mal qui rôde autour de nous.

Néanmoins, jamais son travail ne verse vers le pathos ou le pure cynisme. Ici et là, on observe une lueur d’espoir, un peu de légèreté, presque on oserait dire une forme de romantisme.

« Dans son évolution, l’homme invente et détruit, avide et décadent, traçant un sillon duquel pourront germer les fraîches semences d’étincelles poétiques ». Steeven C. Harvey

Texte: Hélène Paris

Photos: Thierry Gaudé

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